Comment mettre les enfants à l'aise chez le dentiste ? Interview avec la Dr Tania Vanhée

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Soigner les enfants demande bien plus qu’une bonne technique : c’est une rencontre, un dialogue et parfois un petit spectacle improvisé ! Lorsqu’un jeune patient a peur, s’agite ou refuse d’ouvrir la bouche, comment réagir ? En Suisse, comme ailleurs, les dentistes font face à ces situations au quotidien.

La Dr Tania Vanhée, dentiste spécialisée en soins pédiatriques, nous partage ici une série d’astuces concrètes pour rassurer les enfants et instaurer une vraie relation de confiance.


En quoi un rendez-vous pédiatrique diffère-t-il d'un rendez-vous adulte ?

Dr Vanhée : On imagine souvent que la peur est propre aux enfants, mais non. Environ 15 % des adultes sont anxieux au cabinet et 7 % présentent une réelle phobie dentaire. La différence, c’est que chez l’enfant, tout passe par le jeu, la confiance et… le langage.

Avec eux, on communique à trois : dentiste, enfant, parent. Et comme 80 % du message est non verbal, il faut être attentif à chaque signe : une respiration qui s’accélère, un corps qui se tend, un regard qui fuit.


Comment adapter son langage pou aider l'enfant à coopérer ?

Dr Vanhée : Il faut se mettre à hauteur de l’enfant, le regarder droit dans les yeux et parler doucement. J’utilise beaucoup le langage symbolique : au lieu de dire seringue air-eau, je parle de Monsieur le Vent ou Madame la Pluie. Ce type de vocabulaire dédramatise et détourne l’attention du côté médical, comme une sorte d'hypnose conversationnelle.


Qu'est-ce que l'hypnose conversationnelle ?

Dr Vanhée : Rien de spectaculaire ! C’est simplement l’art d’occuper l’esprit de l’enfant avec des mots positifs et ludique. Pendant les soins, je parle beaucoup. S’il n’ouvre pas la bouche, je demande : « Elles sont où tes belles dents ? Tu me les montres ? » En revanche, j’évite absolument les mots peur, mal et piqûre. Les enfants retiennent les mots sensibles, même si on ajoute une négation.


Vous avez d'autres astuces pour motiver les enfants à coopérer ?

Dr Vanhée : Les enfants adorent participer. Je leur dis : « Je n’y arriverai pas sans toi, on fait ça ensemble. » Cela change tout et crée un esprit d'équipe : les enfants deviennent acteurs, plus spectateurs passifs. C’est aussi valable pour le parent : son attitude influence énormément la dynamique du soin.


Le jeu semble essentiel dans votre façon de travailler. Comment l'utilisez-vous ?

Dr Vanhée sourit : Je joue tout le temps ! Mes instruments deviennent mes “jouets”. Je fais semblant de “dessiner sur la dent”, je raconte une histoire, etc. Je n’utilise pas d’écran ni de dessins animés : c’est moi qui capte l’attention. Et pourtant, le jeu ne suffit pas toujours. Parfois il faut réorganiser l’environnement, réduire le nombre de personnes dans la salle, ou adapter le déroulé du traitement.


Que faire lorsqu'un enfant n'est pas coopératif ?

1. Évitez les temps morts

Dr Vanhée : Un enfant ne devrait pas patienter plus longtemps que le soin lui-même. Si j’ai du retard, je propose aux familles d’aller marcher un moment.

2. Miser sur la confiance

Dr Vanhée : Le premier rendez-vous ne doit pas être trop ambitieux. Mieux vaut faire connaissance, visiter le cabinet, et toucher les instruments. Le soin viendra plus tard.

3. Utilisez l'hypnose légère

Dr Vanhée : Les enfants entrent très vite dans une petite transe naturelle. Mais je reste prudente : la version conversationnelle, en utilisant des mots ludiques et symboliques, suffit dans la majorité des cas.

4. Gérer la présence parentale 

Dr Vanhée : Un parent = soutien. Trois adultes = surcharge. Lorsque toute la famille souhaite entrer, je réexplique calmement que pour la sécurité de tous, seule une personne accompagne l’enfant en salle de soins.


Quels conseils donneriez-vous aux étudiants en dentisterie pédiatrique ?

Dr Vanhée : Voici mes 7 règles d’or :

  1. L’anesthésie locale est indispensable pour éviter la douleur.

  2. Ne cherchez pas à tout faire au premier rendez-vous.

  3. Le digue est votre meilleur ami.

  4. Stabilisez les lésions (SDF, verres ionomères).

  5. Laissez les enfants décider de l’ordre lorsqu’ils viennent en fratrie.

  6. Le calme du cabinet reflète celui du praticien.

  7. Désignez un capitaine du bateau quand plusieurs soignants sont présents : une seule voix pour guider l’enfant.


Qui est la Dr Tania Vanhée ?

Dentiste généraliste spécialisée en pédiatrie, la Dr Tania Vanhée est présidente de la Belgian Academy of Pediatric Dentistry, titulaire d’un doctorat en dentisterie et enseignante à Bruxelles. Elle exerce aussi dans son propre cabinet, où elle privilégie une approche humaine, ludique et rassurante.


La dentisterie pédiatrique n’est pas qu’une question de technique : c’est un univers où chaque mot, chaque geste et chaque silence compte. Grâce au langage symbolique, au jeu et à une communication positive, il est possible de transformer une simple consultation en moment de confiance partagé.

Selon la Dr Vanhée « Le soin n’est jamais un acte solitaire : c’est toujours l’enfant, le parent et le praticien qui forment l’équipe. » Et c’est ensemble qu’ils construisent des expériences dentaires sereines, et un sourire durable.

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